La hausse des frais de scolarité: Oui!... Mais!

Yvonne Demers nous partage son point de vue sur un sujet chaud de l'actualité. Yvonne est membre de l'équipe de Chemins de vie.

 

Oui, je l´avoue, je suis favorable à  la hausse des frais de scolarité dans les universités. Je suis favorable mais j´ai plusieurs réserves quant à  la position du gouvernement Charest. Je suis favorable mais j´ai plusieurs questions à  poser aux gestionnaires. J´arbore donc le carré jaune, à  l´exemple de Richard Martineau à  l´émission Tout le monde en parle du 1er avril dernier, même si, plus souvent qu´autrement, je ne souscris pas aux prises de position, en manque de finesse et de nuance, du journaliste chroniqueur animateur.

D´aucuns diront que l´éducation est un droit; j´en suis. Par contre, même si j´encourage l´accès aux études supérieures, je considère qu´aller à  l´université n´est ni un droit ni un privilège. Je dirais que c´est un choix personnel et professionnel à  soutenir du mieux qu´on peut comme famille et comme société. Ce qu´il faut préserver à  tout prix, c´est que tous les jeunes puissent avoir accès à  un diplôme professionnel dans la ligne de leurs forces pour qu´ils puissent devenir autonomes et responsables sur tous les plans.

Faire des études supérieures est un choix à  assumer qui nécessairement comporte efforts et renoncements. En ce sens, je trouve juste et équitable qu´il faille contribuer financièrement et le 17 % qui est demandé aux étudiants me semble parfaitement raisonnable. Ce qui est moins raisonnable, c´est d´exiger une hausse de 75% en si peu de temps. Même l´augmentation du prix de l´essence est plus progressive.

Faire des études supérieures est un choix à  encourager et aucun jeune ne devrait en être privé. La proposition du gouvernement en ce sens ne garantit pas l´accessibilité à  tous les jeunes, particulièrement ceux de classe moyenne. Le plafond de revenu familial pour avoir droit aux prêts et bourses est définitivement trop bas. On salue donc l´ouverture qu´ont laissé entendre le premier ministre et madame Line Beauchamp ces derniers jours pour en bonifier le programme.

Le gouvernement a aussi un devoir de contrôle sur la gestion des budgets des institutions. On a relevé à  ce chapitre plusieurs décisions administratives malheureuses qui révoltent à  juste titre les étudiants en grève et les professeurs qui les appuient. Leur demander de faire leur «  juste  » part sans sanctionner le laxisme ou la trop grande générosité envers leurs semblables de certains gestionnaires est totalement inadmissible. Un grand ménage est à  faire de ce côté.

Un sondage récent auprès de la population révèle qu´une majorité de personnes réclament du gouvernement de faire les premiers pas pour rencontrer les protestataires et tenter de s´entendre sur un dénouement de conflit. C´est le moins qu´on puisse demander en système démocratique. Le mouvement de débrayages et de manifestations est suffisamment important pour reconnaître qu´il y a là  une voix populaire à  écouter et à  comprendre. Bien sûr les représentants du peuple doivent parfois prendre des décisions impopulaires pour la protection des minorités et le bien commun mais ils doivent tout faire pour faire naître des consensus et préserver l´harmonie sociale. Le durcissement des positions, d´un côté comme de l´autre, ne peut qu´être néfaste et mener à  un cul-de-sac.

Quelle que soit l´issue de la crise(!), il faut chaudement applaudir la levée des jeunes pour défendre leur position. Il y a là  un merveilleux exercice de mobilisation, de prise de parole et d´investissement de la chose politique. De quoi raviver l´espoir d´un lendemain créatif et fécond, de quoi rechausser notre foi en l´humanité.

3 avril 2012

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Un commentaire sur “La hausse des frais de scolarité: Oui!... Mais!”

  1. Nadir

    De deux choses l’une :
    D’abord, votre article est très agréable à  lire. Les arguments sont assez bien développés et changent un peu des insultes vis-à -vis du gouvernement que l’on pourrait retrouvé sur d’autres blogs.
    Ensuite, ce qui me chiffonne un peu et c’est pourquoi je prends le temps de répondre à  votre publication, c’est tout simplement le fait de considérer l’université comme étant un choix personnel et professionnel, ce qui est faux.
    Je m’explique, le système d’éducation du Québec est, comme nous le savons tous, composé du programme primaire, du programme secondaire, du Cégep et de l’université. Au primaire, on apprend les bases : Lire, écrire, compter. Au secondaire, on touche un peu à  tout, on se culture (Science, éthique, histoire) et c’est seulement au Cégep que commence réellement l’acquisition du savoir que l’on pourrait appeler post-primordiale.
    Là  où votre argumentaire sonne faux, c’est en considérant les études post-secondaires comme étant une option, un choix personnel. Le métier que l’on exerce dépendrait finalement de notre investissement personnel et de notre volonté à  faire x et y métier.
    Le problème étant que le cégep et l’université, c’est principalement des lieux de savoir, c’est loin d’être des lieux où on forme les gens pour travailler.
    En d’autres termes, les personnes allant dans des domaines aussi abstraits que la chimie, la physique, la philosophie ou autre ne le font pas réellement par choix ou par vouloir de travailler. Ils le font car ils ont la curiosité d’en savoir plus sur ces domaines avec quoi ils sont à  l’aise. Un étudiant ne réfléchit pas à  avoir un travail quand il choisit une filière dans laquelle étudier. Il choisit surtout la filière dans laquelle il est le plus doué naturellement et celle qui lui plait par sa nature propre.
    Bref, les études post-secondaires sont tout aussi primordiales, essentielles et légitimes pour n’importe quel humain que le sont les études au primaire et au secondaire, car on parle ici de développement des capacités individuels et de transmission de savoir, on parle ici du but premier de l’éducation. L’argent et le travail n’est qu’une fonction secondaire, voire même tertiaire de l’éducation, la preuve étant que l’apprentissage du métier se fait via les stages et non pas pendant les cours, car ce n’est pas le but des cours universitaires, comme ce n’est pas le but des cours et de l’éducation tout court.
    Après, on parle de droit et je remarque que vous n’aimez pas associer université à  droit car pour vous, les études supérieurs sont des études facultatifs au bon fonctionnement d’une société, que n’importe qui avec un peu de volonté et d’oseille pourrait aisément exercer n’importe quel métier dans le catalogue offert à  l’université sans que ça puisse poser problème.
    Encore une fois, vous vous trompez. L’éducation a pour but premier de développer les capacités de n’importe quel humain au meilleur niveau possible et ce pour justement trouver sa place dans la société et ne pas être coincé par une sorte de déterminisme social médiéval pouvant à  tout moment refaire surface dans notre société capitaliste. Des facteurs comme l’économie et le marché du travail influencent l’environnement des individus d’une société et donc influencer le choix de leur position dans cette même société. En d’autres termes, ces mêmes individus ne sont pas libres de leur choix, ce choix est déterminé par des facteurs extérieurs. Cette influence étant humaine et non naturelle, elle est donc illégitime, dans la mesure où la crise économique actuelle est la plus belle preuve que certaines personnes profitent de libertés démesurés qui oppriment celles des autres, créant un déséquilibre dans cette même société. La préservation de l’éducation accessible à  tous comme droit est le seul moyen de rendre une société meilleure, équitable, dans la mesure où elle permet une égalisation de la liberté de tous de choisir le chemin qui leur est réellement destiné et une égalisation des chances de, disant le ainsi, changer de classe sociale et sortir de celle dans on est coincé.

    Bref, vous devriez reconsidérez vos propos en tenant compte de ce message que je vous envoie en commentaire pour mieux sésir l’enjeu derrière la hausse, un enjeu d’ampleur qui est bel et bien politique.

    #44