Pourquoi Jésus a-t-il été mis à mort ?

Vendredi saint 2024

Vendredi saint 2024

À chaque vendredi saint, la question revient : « Pourquoi Jésus, cet homme parfaitement intègre, a-t-il été condamné à mort ? » Les gens l’aimaient. Il attirait les foules. Même les gardes envoyés pour l’arrêter n’ont pas osé mettre la main sur lui, parce que, disent-ils, « Jamais homme n’a parlé comme cet homme ». Alors, pourquoi les autorités, religieuse et civile, ont-elles choisi de l’éliminer ? De quoi, le grand-prêtre et Pilate avaient-ils peur ?

On peut penser qu’ils trouvaient dangereuse la façon originale dont Jésus a répondu  à deux questions fondamentales : Qui est l’homme ? Qui est Dieu ?  Il y a deux choses principales que Jésus a découvertes et dont il témoignait par ses attitudes et par ses paroles : la grandeur de la personne humaine et un Dieu proche de nous*. Ses réponses, qui  apportaient du neuf, en ont enchanté certains et en ont choqué d’autres.

La grandeur de la personne humaine, Jésus a pu la découvrir en particulier à l’occasion de ses rencontres avec les personnes marginalisées de son époque. Et parmi elles, les personnes les plus méprisées de son temps  étaient  les « pécheurs Â». À partir de là, Jésus a compris que toute personne, avec ses forces et ses faiblesses, est digne d’un  respect inconditionnel.

À la suite de Jésus, nous  sommes donc invités à croire en la grandeur de toute personne humaine.  En nous inspirant d’une expression de saint Paul, on peut affirmer que, depuis Jésus, il n’y a plus l’homme et la femme, l’adulte et l’enfant, le compatriote et l’étranger, le riche et le pauvre, l’homme libre et l’esclave. Il y a des personnes égales.

Parfois, une personne peut être tentée de douter de soi. Consciente de ses limites, elle n’arrive plus à croire en sa propre grandeur. Elle doit résister à cette tentation dangereuse et garder la foi en soi, en sa propre valeur mystérieuse. S’il est essentiel de croire en Dieu, il l’est aussi de croire en soi.

L’homme est suffisamment grand pour que, d’une certaine façon, Dieu trouve sa place en lui et lui soit intime. Et cette affirmation nous amène à notre deuxième point.

Jésus nous a révélé un Dieu intérieur. Au temps de Jésus, dans le monde méditerranéen, chaque ville avait son ou ses temples pour abriter la statue de son ou ses dieux. Jérusalem avait un temple magnifique, mais il était vide, parce que les juifs ne faisaient pas d’image de leur Dieu. Pour rencontrer leur dieu, les gens se rendaient donc habituellement au temple.

La plupart des gens qui croyaient en Dieu croyaient en une puissance extérieure à eux, s’imposant d’en haut. Jésus lui, proposait un Dieu présent à l’intérieur de chaque personne,  même la plus humble.

Quand une Samaritaine demande à Jésus : « Où me faut-il adorer Dieu : sur le mont Garizim comme font les samaritains ou à Jérusalem comme font les juifs ? », Jésus répond : « ni à l’un ni à l’autre endroit, car l’heure vient où vous adorerez  en esprit et en vérité ».

Jésus croyait en la grandeur d’une personne libre, responsable, habitée par la présence d’un Dieu Père. Pour Jésus, Dieu n’est pas une puissance extérieure et lointaine, mais une présence amoureuse intérieure, au fond de notre être.

Le grand prêtre qui a condamné Jésus croyait plutôt à un Dieu puissant et extérieur, habitant le magnifique Temple.  Et il était réticent à accepter des croyants libres et autonomes.

Pilate n’avait sans doute que peu d’intérêt pour ces discussions religieuses entre juifs,  mais il jugeait que l’action de Jésus était dangereuse pour les intérêts de l’empire colonial romain.

C’est pourquoi, lui et le grand prêtre se sont mis d’accord rapidement pour le supprimer.

Le combat de Jésus, dont nous faisons mémoire en ce vendredi saint, reste encore très actuel. Pensons à Alexeï Navalny, un croyant, mort à 47 ans dans un camp d’internement situé au-delà du cercle polaire au nord de la Russie parce qu’il dénonçait les exactions de Poutine. Et chose scandaleuse, Poutine a reçu, pour sa guerre en Ukraine, l’appui explicite du patriarche de Moscou, le chef de l’Église russe.  

Autre exemple : la guerre que Netanyahou et le Hamas se font à Gaza, où les enfants et les femmes sont les victimes les plus nombreuses.

Si on regarde l’histoire de la relation des humains avec Dieu, on peut y observer une lente évolution où on passe de l’extériorité à  l’intériorité. Dire que Dieu est au ciel, c’est le voir très haut et très loin; le situer dans notre cœur, dans le fond de notre être, c’est plus intime. Décrire Dieu comme un roi tout-puissant assis sur un trône, c’est impressionnant; le voir comme « Notre Père », c’est plus intime.  Jésus utilise souvent l’expression « royaume de Dieu », mais ce Dieu, il ne lui donne pas le nom de « Roi », mais celui de papa, terme plein de tendresse.

Si Jésus est mort sur la croix, c’est parce qu’il a cru en la grandeur de l’homme, grandeur telle que cet homme peut accueillir en lui la présence de Dieu. Mais cela fut alors refusé par les chefs de son temps. Saurons-nous l’accueillir aujourd’hui ?

par Clément Farly

* Je m’inspire ici d’un texte de Marcel Légaut

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